Lundi comme un autre sous les balles de mon pays

Article : Lundi comme un autre sous les balles de mon pays
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15 mai 2017

Lundi comme un autre sous les balles de mon pays

Et si je vous raconte l’histoire d’un lundi comme un autre sous les balles de mon pays ?

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LE RÉVEIL

Je me réveille sans trop de stress en ce lundi 15 mai en Côte d’Ivoire (mon pays), dans la ville d’Abidjan, dans la commune de Cocody et plus précisément, à la Riviera Bonoumin.

Il faut dire que, en tant que free-lance, j’ai un programme assez flexible et aujourd’hui c’est ma journée maison (à part des rendez-vous s’il y en a, je ne bouge pas de chez moi).

Depuis mon lit, j’apprends que les troubles qui ont commencé à l’intérieur du pays le vendredi (nouveau jour favori des fauteurs de trouble) se sont propagés sur la capitale.

L’on est tellement habitué à ces petits troubles que je ne prends pas cela pour argent comptant. J’ai un rendez-vous ce matin et je compte bien m’y rendre.

LE RENDEZ-VOUS

Je dois me rendre à Sofitel pour discuter avec la directrice du Spa. C’est pour moi un rendez-vous à ne pas rater.

Donc, je m’apprête et je prends la route de l’hôtel tandis que ma famille va faire les provisions (on ne sait jamais).

Sur la route, dans la zone de Cocody centre, les voitures circulent, il n’y a pas de troubles ou de tirs. Beaucoup de boutiques sont fermées par contre.

Ainsi, j’arrive à Sofitel et je suis rassurée de voir le hall sillonné par les clients qui discutent, prennent un café et s’informent de la situation. Mon rendez-vous se passe bien et je m’autorise à traîner un peu dans l’hôtel.

Depuis la terrasse du restaurant le Pavillon de Sofitel, je vois le trafic sur le pont de Gaulle. Les voitures circulent, mais c’est vraiment fluide. Je me permets de déjeuner avant de sortir.

LE RETOUR

Dehors, je constate que la situation s’est modifiée vu qu’il n’y a presque plus de voitures, encore moins de passants. Je me rassure en me disant que c’est devant un hôtel et que tant que je reste là à attendre un taxi, tout ira bien.

À côté de moi, une dame vend ses jus et ses galettes. Elle est la seule encore à tenir son commerce dans cet espace pourtant si animé il y a quelques heures à peine. Quelques rares woro-woro (taxis communaux) se rangent pour déjeuner avant de reprendre la route à la recherche de potentiels clients.

Moi j’attends. Finalement, un taxi se décide à me prendre pour la Riviera Bonoumin, mon quartier. Je lui demande ce qu’il pense de la situation. Il me répond que ce n’est pas si grave et que même au cœur de la grande crise il arrivait à travailler. Je suis heureuse de tomber sur un taximètre qui n’a pas peur. Je ne risque presque rien.

Devant l’école de gendarmerie, les plus jeunes gendarmes nettoient les gazons (sérieusement !). Je fixe cette scène surréaliste en me disant que sans doute, comme l’a dit le taximètre, les choses ne sont vraiment pas si graves.

À quelques mètres, devant l’université, un corps gît dans un état lamentable. Je pense qu’il a été battu à mort, au rein, il porte plein de gris-gris (des protections). Je me rappelle un post lu sur mon fil d’actualité Facebook le matin, parlant d’attaque de l’université par les microbes (gang de bandits adolescent semant la terreur et venant en majorité de la commune d’Abobo).

Est-ce l’un d’eux qui est étendu là sur le bord de la route ? Et si les choses étaient finalement plus graves que je ne le pensais ? 

CHEZ MOI

Je suis heureuse de rentrer chez moi saine et sauve. Enchantée je suis, de trouver ma famille réunie essayant de garder le sourire face à une situation où l’on n’a aucun contrôle et aucune information des sources officielles.

Pour mon pays, je prie parce que les heures sombres, je les ai connues, je les ai vécues. Je ne veux pas que notre sol soit imbibé du sang des innocents vu qu’il n’a pas encore fini de purger celui de ceux qui sont tombés durant la crise.

Ce que je ne veux pas, c’est que mon pays soit catalogué comme zone de tension et que tous les efforts pour se remettre sur pieds soient vains.

Enfin, mon souhait pour mon pays et pour ses enfants que nous sommes, c’est la paix. En ce lundi comme un autre sous les balles de mon pays, je veux juste que cela cesse et que cela cesse pour de bon.

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