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Mon premier Ramadan

Je me souviens de mon premier ramadan comme si c’était hier.
Je décide dans cet article de partager ce souvenir avec vous.Une soirée, il faisait chaud, terriblement chaud. Je devais avoir 9 ou 10 ans. J’étais assise dans la cour avec ma petite sœur, nous étions en train de jouer dans le sable. Papa était dans le salon et regardait la télévision tandis que maman était dans la cuisine avec la fille de maison à confectionner le repas.

Tout à coup papa éteignit la télévision et nous appela ma sœur et moi. Je me suis dit qu’il voulait nous raconter une histoire. Il a ce don pour conter. Je pris ma sœur par la main et nous voilà dans le salon. Papa n’avait pas la mine des bons jours et je me mis à réfléchir rapidement à la raison de son mécontentement. Je passais donc en revue toutes les bêtises que j’avais pu faire ces derniers jours mais je ne trouvais rien qui puisse le mettre en colère.

La décision

Il nous demanda de nous asseoir. J’avais les mains moites. Ma sœur, elle,  était trop jeune pour être inquiète. Papa se tourna vers moi et je déglutispéniblement.

  • Mamie (c’est mon petit nom), sais-tu que c’est le ramadan demain ?

Je ne savais pas que c’était le lendemain, mais je savais ce qu’était le ramadan : une période où mes parents ne mangent pas de toute la journée, et le soir, il y a plein de choses sur la table ! Il y a de la bouillie, des beignets, des plats qu’on ne mange pas d’habitude. C’est une période que j’adore !

  • Ah bon ! c’est demain ?
  • Oui, et cette année je pense que toi et ta sœur êtes assez grandes pour commencer le jeûne.
  • Le jeûne ?
  • Oui Mamie, le jeûne. Cela fait partie du mois de ramadan, c’est la période de privation pour se purifier et se rapprocher de Dieu. En plus des prières quotidiennes, on mange à 4 h du matin et on ne mange plus ensuite jusqu’à 18 h.

J’eu subitement mal à la gorge. Les bouillies, les beignets, les bons plats oui. Mais ne pas manger ? Nous sommes encore des enfants ! Pourquoi nous faire ça ? Mais à ce moment là je ne peux pas lui poser de questions. J’ hochais alors la tête et pris ma sœur par la main pour retourner dans la cour. L’esprit n’était plus au jeu hélas ! Demain, je n’allais pas manger de la journée. Cela me rendait triste.

J’entendis papa dans la maison faire les recommandations à maman. J’avais le cœur lourd. Quand il fut l’heure d’aller au lit, j’eus du mal à dormir. Je me tournais et me retournais. Je devais demander pardon. Je le ferai à 4 h du matin quand maman viendrait nous réveiller.

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Ramadan par Strecosa via Pixabay CC

Ce jour là

À 4 h, en face d’une bouillie de mil bien chaude, j’oubliais de demander pardon. Il faut dire que je ne me souvenais que vaguement de cette décision prise la veille par papa. J’avalais goulûment la bouillie avec ma sœur. Ensuite, nous sommes retournées au lit. Nous pouvions faire la grasse matinée car le lendemain il n’y avait pas école.

J’ouvris les yeux à 10 h et je pris ma douche. Ma sœur se réveilla juste après moi. On passa le reste de la matinée à regarder la télévision. Enfin, midi sonnait. Je me rendis donc à la cuisine pour demander ce qu’on allait manger et là, la fille me répond qu’elle n’a rien préparé. J’étais très étonnée. J’ai donc demandé pourquoi, elle me dit que c’était le ramadan et qu’on mangerait à 18 h seulement.

Au salon, ma sœur pleure déjà. Elle a faim et moi aussi. Je lui expliquais les raisons de ce « non déjeuner » mais je n’étais  pas sûre qu’elle comprenne mes propos. Elle comprend juste qu’on ne mange pas et elle pleure de plus belle. De mon côté, mon estomac se mit à grincer tels les gonds d’une armoire mal huilée. Nous n’avions tout à coup plus goût à rien. Nous voulions manger et puis c’est tout. Il fallu pourtant attendre 18 h.

Au final

À 13 h, la fille de maison pris pitié. Elle ne supportait plus les pleurs de ma sœur. De ce fait, attendrie, elle nous tendit deux plats de riz. Je me jetais sur le mien comme une affamée et le dévorais d’une traite. Ma sœur n’était pas en reste.

Finalement nous avons passé ce mois de ramadan à manger normalement ! Mon premier ramadan fut donc un échec. Cependant, cette année là, j’appris personnellement une chose nouvelle et essentielle : le sens de la privation. 

 


Aida Marguerite Bamba, qui es-tu ?

Et toi, Aida Marguerite Bamba, qui es-tu ?

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La question

Je me souviens de cette question posée par une coach lors d’un évènement Google, un après midi au Sweet Garden, un restaurant situé à Abidjan à la Riviera II.

Sur le coup, je n’ai su quoi répondre. Toutes les personnes présentes avaient une réponse. Moi, je n’en avais pas. Je n’ai pu que répéter mon nom.

  • Je suis Aida Marguerite Bamba, c’est tout ce que je peux dire. Ai-je répondu ce jour-là.

Etat d’âme et introspection

Au fond de moi, j’ai ressenti une douleur ou plus précisément un mal-être. Il faut dire que je ne me suis jamais vraiment posé cette question. Je peux disserter des heures sur la transformation industrielle de matières premières, sur la création d’une nouvelle, sur la gestion d’un blog, sur la gestion de comptes sociaux, sur la vie, sur l’espace, sur la musique. Je peux aborder une pléiade de sujets, mais je ne sais pas qui je suis.

Ce jour-là, du Sweet Garden, je suis rentrée chez moi et j’ai fermé les yeux pour me remémorer mon passé pour essayer dans ces pans de souvenirs de trouver assez de substances pour me définir et pour que demain face à cette question, je réponde d’une voix forte : je suis…

Dans ces segments du passé, je me suis vue enfant, turbulente, comique, toujours en quête d’amis. Je me suis vue partageant mes repas, mes conseils, mes affaires, mon sourire, donnant mon cœur à deux mains. Je me suis vue, moquée, battue, blessée, étouffée, rejetée, brisée, entourloupée. Je me suis vue m’accrochant tel un naufragé à une planche de bois en plein océan révolté. Je me suis vu le regard au ciel criant à cette entité qui nous dirige tous mon désarroi, ma solitude.

Aida Marguerite Bamba, qui es-tu ?

À la fin de cette introspection, j’ai trouvé une réponse. La mienne n’est pas aussi belle que celles que j’ai entendues, mais c’est ma réponse.

  • Et toi, Aida Marguerite Bamba, qui es-tu ?
  • Je suis une survivante. 


Lundi comme un autre sous les balles de mon pays

Et si je vous raconte l’histoire d’un lundi comme un autre sous les balles de mon pays ?

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LE RÉVEIL

Je me réveille sans trop de stress en ce lundi 15 mai en Côte d’Ivoire (mon pays), dans la ville d’Abidjan, dans la commune de Cocody et plus précisément, à la Riviera Bonoumin.

Il faut dire que, en tant que free-lance, j’ai un programme assez flexible et aujourd’hui c’est ma journée maison (à part des rendez-vous s’il y en a, je ne bouge pas de chez moi).

Depuis mon lit, j’apprends que les troubles qui ont commencé à l’intérieur du pays le vendredi (nouveau jour favori des fauteurs de trouble) se sont propagés sur la capitale.

L’on est tellement habitué à ces petits troubles que je ne prends pas cela pour argent comptant. J’ai un rendez-vous ce matin et je compte bien m’y rendre.

LE RENDEZ-VOUS

Je dois me rendre à Sofitel pour discuter avec la directrice du Spa. C’est pour moi un rendez-vous à ne pas rater.

Donc, je m’apprête et je prends la route de l’hôtel tandis que ma famille va faire les provisions (on ne sait jamais).

Sur la route, dans la zone de Cocody centre, les voitures circulent, il n’y a pas de troubles ou de tirs. Beaucoup de boutiques sont fermées par contre.

Ainsi, j’arrive à Sofitel et je suis rassurée de voir le hall sillonné par les clients qui discutent, prennent un café et s’informent de la situation. Mon rendez-vous se passe bien et je m’autorise à traîner un peu dans l’hôtel.

Depuis la terrasse du restaurant le Pavillon de Sofitel, je vois le trafic sur le pont de Gaulle. Les voitures circulent, mais c’est vraiment fluide. Je me permets de déjeuner avant de sortir.

LE RETOUR

Dehors, je constate que la situation s’est modifiée vu qu’il n’y a presque plus de voitures, encore moins de passants. Je me rassure en me disant que c’est devant un hôtel et que tant que je reste là à attendre un taxi, tout ira bien.

À côté de moi, une dame vend ses jus et ses galettes. Elle est la seule encore à tenir son commerce dans cet espace pourtant si animé il y a quelques heures à peine. Quelques rares woro-woro (taxis communaux) se rangent pour déjeuner avant de reprendre la route à la recherche de potentiels clients.

Moi j’attends. Finalement, un taxi se décide à me prendre pour la Riviera Bonoumin, mon quartier. Je lui demande ce qu’il pense de la situation. Il me répond que ce n’est pas si grave et que même au cœur de la grande crise il arrivait à travailler. Je suis heureuse de tomber sur un taximètre qui n’a pas peur. Je ne risque presque rien.

Devant l’école de gendarmerie, les plus jeunes gendarmes nettoient les gazons (sérieusement !). Je fixe cette scène surréaliste en me disant que sans doute, comme l’a dit le taximètre, les choses ne sont vraiment pas si graves.

À quelques mètres, devant l’université, un corps gît dans un état lamentable. Je pense qu’il a été battu à mort, au rein, il porte plein de gris-gris (des protections). Je me rappelle un post lu sur mon fil d’actualité Facebook le matin, parlant d’attaque de l’université par les microbes (gang de bandits adolescent semant la terreur et venant en majorité de la commune d’Abobo).

Est-ce l’un d’eux qui est étendu là sur le bord de la route ? Et si les choses étaient finalement plus graves que je ne le pensais ? 

CHEZ MOI

Je suis heureuse de rentrer chez moi saine et sauve. Enchantée je suis, de trouver ma famille réunie essayant de garder le sourire face à une situation où l’on n’a aucun contrôle et aucune information des sources officielles.

Pour mon pays, je prie parce que les heures sombres, je les ai connues, je les ai vécues. Je ne veux pas que notre sol soit imbibé du sang des innocents vu qu’il n’a pas encore fini de purger celui de ceux qui sont tombés durant la crise.

Ce que je ne veux pas, c’est que mon pays soit catalogué comme zone de tension et que tous les efforts pour se remettre sur pieds soient vains.

Enfin, mon souhait pour mon pays et pour ses enfants que nous sommes, c’est la paix. En ce lundi comme un autre sous les balles de mon pays, je veux juste que cela cesse et que cela cesse pour de bon.


Quand il pleut sur Paris, il grêle sur Abidjan

Quand il pleut sur Paris, il grêle sur Abidjan. Cette expression modifiée de l’originale « quand il pleut sur Paris, Abidjan est mouillée » exprime l’engouement excessif des ivoiriens pour ces élections françaises de l’année 2017.

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Un intérêt démesuré

Je ne découvre que sur le tard cet intérêt que je qualifie de démesuré pour ces élections. En effet, je tombe un soir (celui deuxième débat), en consultant mon fil d’actualité Facebook, sur les points de vue de mes amis en ligne qui s’alignent successivement faisant ressembler mon mur en une sorte de RSS d’un grand journal.

Entre les avis vindicatifs sur la candidate du front socialiste, les commentaires approbateurs sur les répliques cinglantes du nouveau président français ou encore des citations sur fond coloré (merci Facebook) des plus belles répliques de ce débat, je ne sais où donner la tête et surtout je me pose une question : ces intervenants sont-ils Français ?

Je comprends que l’on s’intéresse à la politique française, je comprends qu’en tant qu’ancienne colonie encore accrochée au giron « protecteur » de la nation colonisatrice l’on veuille se tenir au fait de ces décisions qui tout compte fait nous concernent quelque peu. Mais, quand on en arrive à analyser les relations de couples du nouveau président, la dentition de la candidate du parti socialiste, à se gausser de l’échec de l’un et faire l’apologie de l’autre, à ne retenir que la surface sans analyser le fond, à mon avis, on frise le falot.

Motus et bouche cousue

On s’exprime sur des événements qui ne changeront rien à nos vies. Parce que, qu’elle ait perdu ou qu’il soit président, cela n’empêchera pas les grèves à répétition, les revendications permanentes, le niveau en chute libre des élèves, les sommes pharaoniques dépensées pour la « lutte contre le chômage », l’insécurité qui ne cesse de s’accroître, les factures qui nous étouffent, le coût instable du carburant…

Nous fermons les yeux sur ces problèmes qui minent notre société et nous nous permettons d’être juges de la politique d’autrui.

Si au moins nous jugions bien. Mais non, plus c’est inutile (pour nous), plus cela est sujet à polémique.

Alors, en espérant que cette grêle cesse bientôt,

je vous salue.


Il tomba et…

Je suis aujourd’hui blogueuse pour Mondoblog. J’ai choisi pour ce concours, le thème : «Intriguée je me suis levée pour regarder par la fenêtre, j’aperçus alors…». Je ne savais pas trop quoi mettre ensuite et puis le texte m’est venu naturellement. Je lui ai donné le titre : il tomba et…

Ce texte ne peut être que le premier de ce blog, vu que c’est grâce à lui que j’ai été retenu. Je le partage avec vous juste en bas.

Il tomba et…

Il tomba et... nouvelle de cultik de bamba aida marguerite pour le concours mondoblog 2017,

Intriguée, je me suis levée pour regarder par la fenêtre, j’aperçus alors devant la cour des voisins un attroupement.

Curieuse de nature, j’enfilai une robe et mes sandales et je me rendis rapidement chez les voisins pour en savoir plus. Au fur et à mesure que je m’approchai, j’entendis les pleurs et les cris. Je compris sans même poser de questions ce qui venait de frapper nos voisins. La mort, la seule chose à laquelle pauvres et riches ne pouvaient échapper.

Je me dirigeai d’un pas de zombie jusqu’au portail de la maison des voisins où se trouvait aussi le gérant de cabine du quartier, un ami. Il m’apprit que c’était le père qui avait succombé à un accident. Il m’apprit également que toutes les personnes qui se pressaient dans la cour étaient les parents du défunt.

Je décidai d’entrer pour présenter mes condoléances à la famille éplorée que je connaissais depuis quelques années. Dans le salon, la veuve assise à même le sol sur une natte avait à ses côtés ses filles et ses fils qui la soutenaient du mieux qu’ils pouvaient dans leur douleur.

Je connaissais la famille depuis de nombreuses années et je me souviens du soutien immense qu’ils nous avaient apporté à moi et ma famille quand nous avions traversé la même épreuve. Je m’approchai de la famille éplorée et pris la main de la mère dans la mienne pour lui apporter mon soutien moral dans une épreuve qui ne faisait que commencer.

Dans la cour, la famille du défunt murmurait déjà regardant les biens avec convoitise et la famille avec une haine non voilée. Je savais ce qui allait suivre parce que chez nous l’après-décès est un processus universel sauf dans le cas où le défunt n’a aucune famille.

Ils allaient réclamer les biens, brimer la famille, se montrer cruels, faire fi des enfants du défunt. Je savais que ce n’était que le début et qu’ils avaient besoin de nous comme nous avions eu besoin d’eux à l’époque.

Les cousines, les tantes et les sœurs faisaient déjà ripaille de tout ce qui pouvait se manger dans la maison profitant pour critiquer le train de vie de la famille et se moquant des jours de dèches à venir.
– on leur prendra tout ! s’exclama une aînée en riant entre deux gorgées de Bissap.
– Elle a tué notre fils ! ajouta une autre.

Je les laissai à leurs piques assassines pour aller informer ma famille et nous préparer à faire front uni avec la famille du défunt dans cette épreuve à laquelle personne n’est réellement préparé.

Parce que chez nous, trop souvent quand un père s’en va, aux yeux de la famille paternelle, c’est une famille qui s’efface.